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Il était égale- ment un sculpteur jouissant d’une certaine réputation, et connu pour avoir créé le mémorial de l’Holocauste à Toronto. Ernest a inspiré chez son neveu l’amour de l’art, et il est à l’origine de la promesse silencieuse que celui-ci se fit, avant de devenir l’étudiant brillant qui suivrait plus tard un cursus d’ingénieur à l’université McGill : il jura que lui aussi, un jour, serait artiste ; le livre que vous tenez entre vos mains est la preuve concrète que cette promesse a été tenue. Il se trouva que, précisément le jour où Simon Raab participait à son premier cours de sculpture à Orlando, en Floride, Ernest Raab, alors âgé de soixante-dix-sept ans, mit son costume de Shabbat, son châle de prières et s’allongea sur son lit, dans son appartement de Toronto. Accablé par la leucémie, souffrant des suites d’une opération de la colonne vertébrale, il mourut d’une overdose d’Oxycontin. Un jour plus tôt, son neveu avait officiellement démissionné de sa fonction de direc- teur de la Faro Technologies, une société qui avait démarré avec trois personnes et était devenue une entreprise de 750 employés, opérant au niveau international. À la Renaissance, lorsqu’art et science allaient naturellement de concert, les peintres étaient des inventeurs qui sondaient le monde afin de le com- prendre – Léonard de Vinci en est un exemple classique. De nos jours, malgré des expressions révélatrices comme l’« art médical », l’atelier et le laboratoire sont considérés de façon conventionnelle et par ignorance comme deux mondes séparés, qui s’excluent mutuellement. Une fois adulte, Simon Raab a passé la majorité de son existence à partager son temps entre les laboratoires et les salles de réunion des entreprises ; et c’est grâce à ces efforts conjugués que son nom a été accueilli dans les pages de Fortune Magazine et de Business Week. Ce qui lui a procuré sa plus grande satisfaction personnelle, ce sont les patients qui lui ont témoigné leur reconnaissance pour avoir sauvé leurs vies grâce à ses inventions, ce dont il convient lui-même sans aucune trace de fausse humilité. Une telle consécration est la preuve tangible que le fils a accom- pli le rêve pragmatique du père. Et c’est elle qui lui a permis de se consa- crer à son propre rêve, celui de devenir un artiste – un rêve dont il avait différé la réalisation pendant trente ans. C’est avec raison que Baudelaire dit du style qu’il est caractère. L’inverse de cet aphorisme est tout aussi vrai : le caractère est style. Simon Raab se consacre à son art avec la tournure d’esprit et la méthodologie du scientifique. En fait, appliquer une « méthode scientifique », c’est faire exactement ce que Jasper Johns recommandait : « Fais quelque chose, puis transforme-le, puis transforme-le encore ». Et, le long du parcours, observe, et réfléchis aux conséquences de ce que tu es en train de faire. Cette attitude scientifique présente un aspect éminemment réconfortant : dans l’atelier, l’impression d’échouer peut avoir un effet déprimant ; et c’est vrai en particulier de ceux, comme les artistes jeunes, possédant un moi sensible et pour qui la création artistique est un territoire encore inexploré. Avides de réaliser une œuvre originale, il leur est facile d’in- terpréter un échec dans l’atelier comme un échec personnel. À l’inverse, dans un laboratoire, le concept d’expérience ratée n’a aucune pertinence. Parfois, en laboratoire, les choses prennent une tournure prévue ; quand c’est le cas, nos hypothèses se trouvent vérifiées. Mais il est également vrai que c’est en apprenant ce qu’il ne faut pas faire que l’on progresse. En revanche, les expériences qui ne se déroulent pas comme prévu ris- quent d’être rejetées en tant qu’erreurs d’aiguillage vers un but prédéter- miné. Mais il ne faudrait pas confondre ceci avec un rejet inconditionnel. L’empirisme demande un œil aiguisé et une certaine ouverture d’esprit. Lorsque Sir Alexander Fleming découvrit les spores de moisissures qui 35